Pain de couscous aux poivrons marinés
Vous, vous êtes superstitieux
ou pas? Moi, je ne le suis pas, et je ne l'ai jamais été. Mais la
semaine dernière, j'ai passé proche de le devenir... Sauf que là,
maintenant, je sais que jamais je ne le deviendrai.
D'abord, deux miroirs cassés. Accroché bêtement d'un coup de balai, mon grand miroir de chambre tout neuf se fracasse à mes pieds. Plus de peur que de mal. Le lendemain, alors que je suis dans la pièce d'à côté, l'un des miroirs de la salle de bain tombe sur les carreaux. Lui, à peine fêlé; moi, un peu troublée. Bah! «Les superstitions, j'y crois pas». Ouais... c'est pas si simple de juste pas y croire. C'est un signe? Un miroir cassé, sept ans de malheur... et de deux. Quatorze? Bon, bon, ça va faire. Plus tard, dehors, en tentant tant bien que mal d'éviter les zones glacées des trottoirs, je me faufile entre quelques personnes pour rapidement prendre le chemin qu'aucune autre ne semble vouloir prendre. Je comprends pourquoi une fois de l'autre côté seulement. Comme répondant à un appel, je fais volte face; je viens de rompre le triangle de l'échelle. Bon, pourquoi m'en faire au fond? Ce n'est pas la première fois, pourquoi est-ce qu'aujourd'hui, ce serait différent? Restaient le sel et le chat noir. Vendredi dernier, j'ai gâché un plat en raison d'une salière dont l'embout a lâché, laissant s'échapper suffisamment de sel pour non seulement ruiner mon souper, mais aussi ajouter une grosse pincée aux signes annonciateurs d'un malheur qui semblait se dessiner. Et pour les chat noirs, inutile d'en parler... Pas moins de cinq errent sur ma rue quotidiennement. J'y suis habituée. Avouez qu'après ça, toute personne vraiment superstitieuse se serait attendue à la pire des catastrophes. J'y croyais presque... jusqu'à ce qu'arrive dimanche.
Dimanche, toute la journée, j'ai senti dans mon coeur comme une rafale de petits bonheurs.
De nombreuses bonnes nouvelles se sont succédé, effaçant peu à peu tous
les précédents signes si décourageants. Au matin de cette journée, j'ai
bravé la tempête pour prendre le petit déjeuner en compagnie d'une
personne que j'avais côtoyée dans un contexte plutôt expéditif et un
environnement bondé, et avec laquelle j'avais très envie d'approfondir mes
rapports. Ces trois heures passées ensemble m'ont confirmé tous les
points communs que je nous soupçonnais d'avoir, malgré nos nombreuses
différences. Trois heures de discussions tantôt profondes tantôt
anodines, de regards complices et de rires, de confidences et de
projets d'avenir. Nous avons parlé bouffe, évidemment. De nos
expériences, de nos préférences et de nos approches respectives. Sur le
chemin du retour, quoique désorientée par la neige qui m'aveuglait, je
voyais clairement. Je voyais que quand on aime et qu'on y croit, quand
on sème tranquillement ses petites graines ici et là, inévitablement,
ça se met à fleurir autour de soi. Il faut apprendre à ignorer les
mauvaises herbes et continuer à arroser et à admirer toutes ces fleurs qui nous agayent.
Et le lien avec la recette présentée? Je l'avoue, cette longue introduction était bien plus un prétexte pour vous partager mes pensées heureuses, mais je crois tout même possible d'en établir un. Voyez-vous, aujourd'hui, trois jours plus tard, je suis encore étonnée de voir à quel point cette personne a su si bien me lire. Quelques-uns de ses propos : «Il y a chez toi cette façon de nier la nourriture pour la réinventer.» C'est trop vrai. Quand j'observe des aliments à cuisiner, j'ai souvent et instinctivement tendance à vouloir les détourner du chemin qu'ils ont l'habitude de prendre. J'ai envie de m'aventurer hors des sentiers battus, d'expérimenter autre chose que ce que l'on attend d'eux. Pour preuve, le pain du jour (ou terrine, c'est comme vous voulez). Cette fois-ci, avec le couscous, point de salade, de taboulé ou de plat royal. Que non. Pourquoi ne pas rendre au couscous la vraie nature du couscous? Celle qui lui «colle à la peau». Oui, son caractère collant, justement. Pourquoi l'égrainer constamment et avec acharnement, alors qu'à merveille, il colle si naturellement? Voici un plat qui change des mets de couscous que l'on connaît tous. Un plat coloré qui pourrait aussi très bien plaire sur votre table des Fêtes.
Pain de couscous aux poivrons marinés, olives et feta (version améliorée)
2 tasses (250 g) de couscous tamisé bio
2 tasses (500 ml) de bouillon aux fines herbes (ou légumes, poulet, etc.)
Poivrons rouges et jaunes rôtis marinés, coupés en lamelles
Le zeste et le jus d'un citron
100 g (environ 3/4 tasse) de feta de brebis
1 poignée d'olives, tranchées finement
4 c. à soupe de yogourt nature
Sel, poivre, épices et herbes au goût (fenouil, basilic, romarin, persil, etc.)
Mettre le couscous dans un grand saladier. Verser le bouillon chaud, couvrir et laisser gonfler de 5 à 10 minutes. Tapisser un moule à cake d'une pellicule de plastique. Y déposer les lamelles de poivrons, en faisant monter sur les côté et en alternant les couleurs, puis réserver. Une fois le couscous cuit, incorporer le zeste et le jus du citron, les olives, le yogourt et les herbes. Saler, poivrer et mélanger. Étendre dans le moule en veillant à ce que les extrémités des lamelles de poivrons restent sur les côtés. Procéder graduellement, en pressant fortement à l'aide d'une cuillère (ou des mains; ça va beaucoup mieux) pour que les grains de couscous collent bien. Couvrir et réfrigérer au moins deux heures. Retourner sur un plat de service pour démouler. Tirer délicatement sur la pellicule de plastique pour aider au démoulage. Trancher et servir avec un coulis de poivrons rôtis (mixer quelques poivrons rôtis avec un soupçon de miel).
Ce pain se décline à volonté, en plat sucré ou salé. Laissez ces petites graines de bonheur vous inspirer!
JOYEUSES FÊTES!